Jean-Baptiste Andréa, le prix Goncourt de la raison

C’était le favori des pronostics. Parmi les quatre finalistes du prix Goncourt, Jean-Baptiste Andréa était le choix le plus simple, le plus attendu.Neige Sinno et son éprouvant Triste Tigre, a récolté lundi le prix Femina, un doublé était donc inenvisageable. Éric Reinhardt et son magnifique Sarah, Susanne et l’écrivain, était peut-être un peu trop ésotérique pour l’emporter, et Gaspard Koening, avec Humus, n’a jamais vraiment été dans la course.

Va donc pour Jean-Baptiste Andréa et son Veiller sur elle, couronné ce mardi 7 novembre, par le plus prestigieux prix littéraire français.

Pour l’auteur, c’est l’aboutissement d’une carrière d’écrivain qui a commencé il y a seulement six ans.

C’est aussi l’occasion de donner un coup de projecteur à une maison d’édition indépendante, L’Iconoclaste, qui publie notamment Cécile Coulon ou Adeline Dieudonné.

Que penser, donc, de ce Veiller sur elle, qui s’apprête à entrer dans l’Histoire de la littérature française ? Il s’agit d’un roman de facture plutôt classique, simple et abordable, qui suit le parcours d’un sculpteur fictif, Mimo, né de parents modestes, et de son histoire d’amour avec Viola, fille de la haute aristocratie dans l’Italie fasciste de l’entre-deux-guerres.

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Rien à dire, Jean-Baptiste Andréa est un conteur de talent, c’est aussi un scénariste, et cela se sent. On imagine très bien une adaptation en série pour une plateforme de streaming genre Netflix.

Les péripéties s’enchaînent sans temps mort, les personnages sont plutôt attachants… Mais voilà, il manque quelque chose. Ce livre, c’est ce que l’on appellerait “de la belle ouvrage”, un travail sérieux, soigné et appliqué.Mais quand même… un petit regard vers ceux qui ont été écartés laissent planer quelques regrets.

Éric Reinhardt, par exemple, excelle à brouiller toutes les cartes avec son style nuancé et interroge sur les notions de double et d’identité.

Le lecteur est perdu dans un labyrinthe où le réel et la fiction s’entremêlent. Peu importent les fausses pistes et les rebondissements rocambolesques, on suit l’auteur comme s’il était le Joueur de flûte d’Hamelin.

Dans Veiller sur elle, tout est clair, limpide. Un peu trop, même. On est tellement tenus par la main qu’il est impossible de s’échapper. C’est un peu dommage, car la littérature, ça sert aussi à ça. À partir très loin… 

Veiller sur elle, par Jean-Baptiste Andréa, éditions l’Iconoclaste, 582 pages, 21,90 €. L’auteur sera présent à la Foire de Brive-la-Gaillarde, les 11 et 12 novembre.

Et aussi. La proclamation du prix Goncourt ne doit pas éclipser celle du prix Renaudot, qui a été remis à Ann Scott, grâce à son livre Les Insolents (Calmann-Lévy). Une consécration pour une romancière aguerrie qui a commencé dans les années 90 avec les sulfureux Asphyxie et Superstars. Le prix de l’essai a été décerné à Jean-Luc Barré pour le premier tome, en plus de 900 pages, d’une immense biographie : De Gaulle, une vie : l’homme de personne (1890-1944), aux éditions Grasset.

Rémi Bonnet