Une reprise économique teintée de risques au menu des réunions du FMI
Le Fonds monétaire international (FMI) et la banque mondiale (BM) ont entamé jeudi leur réunion d'automne dans un contexte de reprise économique mondiale teintée d'inquiétude notamment sur la remise en cause des traités commerciaux.
"Après plusieurs années de croissance décevante, l'économie mondiale a commencé à accélérer", a déclaré jeudi le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim lors d'une conférence de presse.
Pour autant, il a souligné son inquiétude que "des risques tels qu'un protectionnisme croissant, des incertitudes politiques ou de possibles turbulences des marchés financiers puissent compromettre la reprise fragile".
Hasard du calendrier, ces assemblées se déroulent au moment où les tractations sur la renégociation du traité de libre-échange nord-américain (Aléna) ont repris près de Washington, à Arlington, dans un climat très tendu.
Martelant qu'il devait "protéger" les travailleurs américains, Donald Trump a réitéré ses menaces de se retirer de ce traité qu'il juge destructeur d'emplois et responsable du déficit commercial colossal avec le Mexique (plus de 64 milliards de dollars).
Le FMI a dévoilé des prévisions plus optimistes sur la croissance mondiale. Après une hausse de 3,2% en 2016, le produit intérieur mondial (PIB) devrait progresser de 3,6% cette année, et 3,7% l'an prochain, soit une légère amélioration de 0,1 point par rapport aux précédentes prévisions de juillet.
"Ce n'est pas le moment d'être complaisant", a pourtant insisté sa directrice générale Christine Lagarde lors d'une conférence de presse jeudi. "Il est temps de prendre les décisions politiques qui permettront à plus de gens et plus de pays de bénéficier de cette reprise qui doit aussi être durable", a-t-elle ajouté.
- "Réparer le toit" -
Paraphrasant John Kennedy, elle a exhorté les pays "à réparer le toit" pendant que l'économie se porte mieux afin de réduire aussi les inégalités.
"Trop de personnes voient leurs aspirations limitées par l'impact des technologies et les répercussions excessives des inégalités de revenus", a poursuivi Mme Lagarde. Avec pour conséquence, une montée du scepticisme sur les bénéfices de la mondialisation.
Interrogée sur l'éventuel impact de la renégociation de l'Aléna, la responsable a souligné la nécessité de renégocier un traité vieux de près d'un quart de siècle signé avant même l'utilisation des téléphones portables.
"Les traités commerciaux doivent prendre en compte les changements afin de s'ajuster et de continuer à faciliter le commerce et à l'amplifier", a-t-elle fait valoir.
Sans citer les Etats-Unis, Christine Lagarde avait déjà exhorté mercredi les pays à ne pas céder à la tentation du protectionnisme et du repli sur soi.
"La meilleure réponse politique aux défis (posés par la mondialisation) n'est pas de tourner le dos au commerce", a estimé Christine Lagarde.
"Tout ce qui peut, dont la renégociation de l'Aléna, entraver le commerce et les relations commerciales transfrontalières aurait des conséquences pour toutes les parties impliquées" dans le traité, a également prévenu Maurice Obstfeld, chef économiste du FMI.
De nombreux économistes ont souligné que malgré les critiques de l'administration Trump, l'Aléna a profité aux trois pays signataires (Canada, Etats-Unis, Mexique). Ils ont également mis en garde sur les répercussions négatives sur l'économie américaine en cas de retrait de Washington de l'accord.
Outre la tentation du protectionnisme, le FMI s'inquiète de l'endettement croissant des pays émergents et de certains pays membres du G20, qui pourrait compromettre la reprise.
"Malgré des taux bas, le poids des intérêts de la dette a augmenté dans plusieurs économies majeures", a constaté mercredi Tobias Adrian, responsable du département chargé des marchés monétaires et des capitaux du FMI.
"Cela représente l'un des risques les plus importants à terme si les taux d'intérêts remontent fortement", a-t-il mis en garde alors que la banque centrale américaine met progressivement un terme à sa politique accommodante de ces dernières années et que son homologue européenne devrait lui emboîter le pas.
Avant même le début de son assemblée annuelle, le FMI avait pressé les pays du G20 de résorber les déséquilibres extérieurs comme intérieurs, allant des échanges commerciaux à l'endettement, pour éviter la division et de mettre en danger la dynamique retrouvée de la croissance.
Les ministres des finances du G20 devaient se réunir jeudi soir pour aborder la situation économique mondiale et évoquer ces risques.