La vie au travail bousculée par le numérique
Ce rapport commandé par le prédécesseur de Myriam El Khomri doit être remis, ce mardi, à la nouvelle ministre du Travail. En présentant la semaine dernière les grandes lignes de la future réforme du droit du travail, le Premier ministre Manuel Valls avait évoqué les impacts sociaux "de plus en plus lourds" du numérique et la nécessité de légiférer dans le champ ouvert par la commission Combrexelle.
Ce travail, fruit d'une trentaine d'auditions, complété d'études, fournit quelques pistes au gouvernement, comme aux partenaires sociaux, qui devraient se pencher sur le sujet lors de la conférence sociale du 19 octobre. Le rapport insiste au préalable sur l'ampleur de cette révolution technologique éclair, qui ne se résume pas à l'usage de nouveaux outils. Elle favorise de nouveaux modes de production ou de fonctionnement "plus coopératifs et plus collectifs", en même temps que travail à distance ou le travail hors salariat (free lance, auto-entreprise...).
Pour "accélérer" cette évolution, il y a "urgence" à former tous les salariés, à commencer par les managers en première ligne, estime M. Mettling, qui propose de donner six mois aux branches professionnelles pour faire remonter les besoins.
Sans attendre, le DRH invite également salariés et entreprises à interroger leurs pratiques pour préserver "le nécessaire équilibre vie privée-vie professionnelle", une "question absolument centrale, notamment pour les cadres". Il suggère notamment de "compléter" le droit à la déconnexion par un "devoir de déconnexion".
Bonnes pratiques
Les entreprises, écrit-il, doivent "encourager" la déconnexion par des "chartes", l'"exemplarité des managers" ou "la configuration par défaut des outils".
Si, sur la déconnexion, le rapport suggère de faire confiance au dialogue social dans les entreprises et les branches, il préconise en revanche de légiférer pour "sécuriser" le forfait jours, régime dérogatoire introduit en 2000, qui permet de rémunérer des salariés autonomes en fonction du nombre de jours travaillés par an, et non des heures travaillées. Pour la mission Mettling, ce régime couvrant déjà près de la moitié des cadres est la "réponse la plus adaptée" aux nouvelles formes de travail.
Autre préconisation pour certains secteurs: mesurer la "charge de travail", pas seulement le temps de travail, avec la possibilité pour le salarié d'un "droit d'alerte individuel". Un "préalable indispensable pour pouvoir étendre les cas d'usage du forfait jours de façon raisonnable", affirme le rapport.
Pour les entreprises du secteur numérique proprement dit, il pousse l'idée plus sensible de pouvoir déroger de manière exceptionnelle, et cadrée par des accords d'entreprise, aux temps de repos quotidiens.
Le DRH d'Orange propose en outre de "clarifier" la définition de salarié et de travailleur indépendant et de bâtir pour les non salariés un régime de protection sociale avec des droits "attachés à la personne et transférables", comme dans le compte personnel d'activité prévu pour les salariés.
Quant au travail à distance qui concerne déjà plus de 16% des salariés, "son développement (est) un enjeu pour la réussite de la transformation numérique" et il convient de "diffuser les bonnes pratiques": maintien d'une présence physique régulière afin d'éviter l'isolement du salarié ou "réversibilité réciproque".