Un éleveur de Creuse jugé pour avoir "mal nourri, mal abreuvé, mal soigné" des bovins
Ce jeudi 27 avril, le tribunal judiciaire de Guéret s'est penché sur le cas d'un homme de 65 ans, connu par les services vétérinaires de la Creuse pour ses multiples infractions en matière d'élevage de bovins.
Nous sommes en 2022 et à plusieurs reprises, les services vétérinaires de la Creuse relèvent des infractions sur une exploitation bovine du nord du département.
Infractions au code rural et pénalUne première fois, les agents retrouvent une carcasse sans boucle d'identification. Une autre fois, ils retrouvent des bovins sans lumière ni abreuvement et identifient plus d'une vingtaine de bêtes dont la naissance n'a pas été notifiée à l'administration compétente. Ils repèrent aussi un seau de boucles d'identification falsifiées. L'éleveur de 65 ans est connu pour son entêtement à ne pas suivre la réglementation. Mais si des faits relèvent d'infractions au code rural, d'autres relèvent du pénal. D'où sa présence, ce jeudi 27 avril, à la barre du tribunal judiciaire de Guéret.
Pour se défendre, il évoque des problèmes personnels. Il a failli mourir d'une leucémie, a dû s'occuper de son père pendant plusieurs mois avant son décès l'année dernière et puis il avait les bêtes à soigner.
« Pourquoi est-ce que vous travaillez seul ? Plus d'une centaine de têtes, c'est un gros élevage. Pourquoi ne pas avoir recruté d'ouvrier ? », demande le président du tribunal Michael Humbert. Le prévenu évoque un précédent recrutement qui s'est mal passé. Mais le président est sceptique. Quand Michael Humbert pose la question de savoir pourquoi il n'a pas fait appel au service compétent pour se débarrasser de la carcasse qui trainait dans un de ses champs, l'agriculteur lâche : « J'avais pas que ça à faire ! » S'agissant des boucles d'identification falsifiées, il évoque des « petits gamins » venus faire ça sur son exploitation.
« Obstination à enfreindre la réglementation »Une représentante des services vétérinaires s'approche de la barre.
On est clairement dans une impasse. On a essayé plusieurs choses dont l'accompagnement. Il n'en fait qu'à sa tête, il a ses propres lois. Il fait preuve d'une indépendance farouche.
Et regrette son « obstination à enfreindre la réglementation ».
D'ailleurs, les problèmes perdurent avec l'exploitation du prévenu. Deux PV ont été dressés par les gendarmes en 2023 pour divagation d'animaux, rapporte le président du tribunal.
Une possible saisie des animaux ?La procureure Alexandra Pethieu juge que le prévenu « fait preuve depuis des années d'incurie totale ». « Il a mal nourri, mal abreuvé, mal soigné ses animaux et est incapable de se remettre en cause (...) Jamais, il ne se mettra en règle. » Elle requiert une peine de six mois de prison avec sursis simple, plusieurs amendes pour un total d'environ 2.700 euros. Et pose la possibilité d'une saisie du cheptel.
Pour l'avocate du prévenu, Coralie Mayaud, le système de traçabilité des animaux commence à connaître ses limites. Il se révèle compliqué pour des éleveurs qui, comme son client, ont commencé le métier il y a plus de 40 ans. Elle relativise le problème de falsification des boucles d'identification, car des contrôles sont effectués en entrée et sortie de marché. Et estime enfin que son client peut encore régulariser sa situation. L'audience lui a fait un « électrochoc », assure-t-elle.
Délibéré au 25 maiCompte tenu des lourds enjeux - notamment sur la saisie des animaux qui représenterait une perte financière située entre 200.000 et 300.000 euros - le tribunal s'est donné un peu moins d'un mois pour réfléchir à sa décision. Le délibéré sera rendu le 25 mai.
Daniel Lauretdaniel.lauret@centrefrance.com