"Une belle source d’espoir" : des milliers d'opposants déterminés contre les méga-bassines dans le Puy-de-Dôme

Ce samedi 11 mai, des milliers d’opposants au projet de construction de méga-bassines se sont rassemblés dans le Puy-de-Dôme pour une randonnée « festive ». Objectif : montrer leur détermination et sensibiliser l’opinion publique.

« Nous organisons cet événement depuis un an avec un rythme accéléré ces six derniers mois. Nous sommes vraiment heureux d’avoir pu réunir autant de personnes pour montrer notre détermination dans la lutte de ces projets de méga-bassines ici, dans le Puy-de-Dôme, mais également partout en France », explique Ludovic Landais de la Confédération Paysanne 63. 

Ce samedi 11 mai, ils étaient effectivement 4.000 selon les forces de l’ordre et 6.500 selon les organisateurs. Nul doute, les opposants au projet de ces retenues d’eau sont bien venus en nombre dans le Puy-de-Dôme pour participer à « cette randonnée festive », dont le départ a été donné à Chignat, dans la commune de Vertaizon, à l’est de Clermont-Ferrand.

A la tête de ce rassemblement, cinq collectifs : la Confédération Paysanne du Puy-de-dôme, BNM63, Extinction Rebellion, les Faucheurs Volontaires et les Soulèvements de la Terre, qui ont donné rendez-vous « à tous ceux qui veulent lutter et s’opposer à ces différents projets ».

Et si le choix du lieu de cette randonnée a été porté dans ce coin de France, ce n’est pas un hasard. C’est en raison de deux projets de construction de méga-bassines portés par l’association Syndicale libre des Turlurons composée de 36 agriculteurs et qui devraient être les deux plus grandes de l’Hexagone. Cependant, si la première située du côté de Bouzel pourrait voir le jour, cela ne sera pas le cas pour la seconde, initialement prévue à Saint-Georges-sur-Allier (ndlr : les analyses géologiques l’ont stoppée net, mais des recherches sont effectuées pour trouver une autre parcelle.) 

Ainsi, le convoi a quitté son point de départ en gare de Chignat pour se diriger justement à l’endroit où une de ces méga-bassines d’une dimension de 15 hectares (soit 1,05 million de m3) pourrait être construite.

Ici, les milliers d’opposants ont voulu réaliser un acte symbolique en formant une chaîne humaine et en plantant tout autour de cette potentielle retenue d’eau des noisetiers et des charmilles notamment. Parmi eux, Octave de Montpellier, qui a donc parcouru plus de 300 kilomètres pour être présent lors de cet événement. « C’était une évidence de faire le déplacement », assure-t-il. 

Ce rendez-vous a ainsi rassemblé des personnes issues de toute la France, mais aussi des locaux, plutôt inquiets de ces projets de méga-bassines tout près de chez eux. C’est le cas d’Agnès et de Gus, deux retraités de Billom, une petite ville proche du projet de bassine de Bouzel. Ils avaient un peu peur d’éventuels débordements, mais l’enjeu est tel qu’ils ont décidé quand même de participer à cette randonnée. 

Ces méga-bassines, ce n’est pas écologique et c’est fait avec de l’argent public. Il y a d’autres solutions avec des plantations moins gourmandes en eau par exemple. Nous sommes très inquiets de la gestion de l’eau. Nous pensons à nos enfants et à nos petits-enfants.

Le convoi a poursuivi son chemin dans une ambiance plutôt bon enfant à travers la plaine de la Limagne, une grande zone agricole de l’est du Puy-de-Dôme.

Le deuxième point d’arrêt s’est tenu au bord d’un champ où une autre action a été menée afin de montrer qu’il était possible de restaurer une zone humide. Chacun a été invité à combler des fossés remplis d’eau depuis les dernières pluies, avec des branches, de la terre et des touffes d’herbes.

« Ils drainent systématiquement les sols et après, ils veulent faire des bassines », dénonce un responsable de la randonnée. « Aujourd’hui, on va laisser l’eau s’infiltrer dans le sol, cela a un peu plus de sens. »

C’est également à cet instant que des personnalités politiques de la France insoumise et d’Europe Écologie les Verts ont pris la parole (voir ci-dessous).

La randonnée s’est achevée comme elle avait commencé, en fin d’après-midi, de manière festive et sous un soleil encore généreux, sur un grand parking où étaient dressés buvette, sono et stand associatif, dans le centre-ville de Billom.

Adèle Desmoulin, l’une des porte-paroles de BNM63, avait le sourire. 

Le bilan est ultra-positif. Nous avons pu réaliser les actions que l’on voulait faire, parler des autres pratiques agricoles, montrer que cela est possible. Maintenant, on va voir comment cela réagit dans l’opinion publique. Nous avons montré que l’on était très nombreux à s’opposer.

Ludovic Landais, tout aussi radieux, se félicite de « la beauté de la manifestation, très colorée, de la bienveillance dans le parcours, y compris des forces publiques. Et surtout du nombre. 6.500 manifestants, c’est inespéré. Il faut vraiment que ça leur parle. Le projet n’est pas sorti de terre et on est là ». 

La locale de l’étape, la députée du Puy-de-Dôme Marianne Maximi, était présente accompagnée de deux autres députés de la France insoumise, Clémence Guetté et Mathilde Panot. La cheffe de fille à l’assemblée n’a pas manqué de s’exprimer en signifiant « que les multinationales à l’instar de Limagrain et de Danone avec Volvic dans le Puy-de-Dôme étaient des voleurs d’eau et qu’elle espérait, vu le nombre d’opposants présents à ce rendez-vous, que ce projet de méga-bassines n’aboutirait pas ».

De son côté, Marianne Maximi a déclaré : « Ce jour a été une démonstration de force, près de Clermont-Ferrand, avant que le projet ne soit réalisé. Le Puy-de-Dôme et l’Auvergne étaient considérés comme le château d’eau de la France. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Nous sommes le symbole de la lutte pour le partage de l’eau. Par notre mobilisation, nous ferons reculer Limagrain. Le modèle de l’agriculture est ici dépassé. »

L’eurodéputé écologiste, Benoît Biteau a rappelé « qu’on occultait le poids de l’argent public destiné à ces projets prévus pour une poignée d’agriculteurs qui accaparent l’eau. Ce bien commun doit s’infiltrer dans les sols et recharger les nappes afin de servir tous les usages. Il est important de laisser les paysans travailler avec des cultures qui s’adaptent au changement climatique. Ce rassemblement est une belle source d’espoir car les tous les citoyens ont leur mot à dire et ils sont nombreux à s’opposer à ces méga-bassines. »

Texte : Stéphanie Merzet et Olivier Chorusko Photos : Thierry Nicolas et Francis Campagoni