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Декабрь
2015

Les pièges d'une déclaration de guerre

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Les pièges d'une déclaration de guerre Selon le penseur allemand Carl Schmitt, la guerre, et plus particulièrement déclarer celle-ci, sont les phénomènes politiques par excellence. À ses yeux de juriste et ancien membre du parti nazi, le chef d'un Etat, en prenant la décision de faire basculer une situation pensée comme normale vers une belligérance entre de plein pied dans ce qui est véritablement le politique, à savoir le domaine de l'exception. De même que l'économie et la paix "dépolitisent", le conflit, diplomatique, et bien évidemment militaire, illustre par excellence le politique, champ de la décision extraordinaire, du décret exceptionnel, de l'ukase singulier. Même s'il dit ne vouloir que réagir à une agression extérieure, il ne saurait échapper à cette ontologie du politique, selon laquelle, malgré toute prétention à la sécularisation de la pensée, un chef d'Etat n'est réellement lui-même que lorsqu'il décide, mieux, qu'il ordonne quelque chose d'extraordinaire, à la manière de Dieu, rompant avec le temps de la "normativité" qui est celui de la gérance et de l'administration. Lorsque ce sont les normes et les règles habituelles qui l'emportent, le politique est absent de la situation. A l'inverse, quand les circonstances requièrent d'introduire l'éthique de l'exception, c'est là qu'il naît.

En toute cohérence, le philosophe allemand adosse à cette théorisation, une pensée de l'ennemi et de l'ami. Si la guerre est par essence l'acte politique, il faut bien s'engager dans une démarche inique par rapport à certains, honnête par rapport à d'autres. En d'autres mots, définir l'objet de sa vindicte et de sa vengeance, contre lequel seront mobilisées des ressources et des logiques d'exception (armée, idéologie, lois, alliances y compris "contre nature"...), mais également celui de son appui et de sa compréhension envers celui qui permettra de vaincre le premier.

Néanmoins, depuis le 13 novembre dernier, les plus hauts responsables français évoquent de manière assumée la guerre comme horizon, permettant notamment au chef de l'Etat d'endosser la vêture du commandant en chef, cherchant à déployer en stratège d'une conjoncture exceptionnelle - une capitale ensanglantée - les moyens diplomatiques et militaires idoines destinés à terrasser l'Etat islamique, parrain de la forfaiture. Si, de prime abord, il semble permis d'observer une logique schmittienne dans ce qui se joue aujourd'hui au plus haut sommet de l'Etat, il convient néanmoins d'alerter contre ce qui nous paraissent les illusions d'une guerre contre le terrorisme et l'Etat islamique.

Tout bon stratège sait ainsi qu'il doit certes définir mais surtout comprendre son ennemi. Il doit en outre apprendre des victoires et défaites suscitées par l'action des pairs qui ont eu à affronter des situations analogues. Enfin, comme elle semble se dessiner, la lutte que l'Etat français souhaite initier a pour vocation de se faire contre une ressource politique (le terrorisme) et un acteur revendiquant non seulement de constituer un Etat mais également de représenter une religion. Est-il dès lors envisageable de s'attendre à une victoire dans cette "guerre" qui s'annonce ?

Tout d'abord, l'histoire récente nous enseigne que la dernière tentative de se débarrasser à grande échelle du terrorisme international et de l'acteur qui le portait (al-Qaïda) a abouti à l'un des plus grands échecs politiques de notre époque. L'administration Bush Jr, ambitionnant de redistribuer les cartes régionales au Moyen-Orient en vue de permettre sa démocratisation, et ce faisant, sa pacification, a exactement engendré l'antithèse. Le traitement militaire d'une question pourtant fondamentale - à quoi correspond politiquement le jihadisme contemporain ? - ainsi que les erreurs gravissimes commises dans la foulée du renversement du régime de Saddam Husseïn (dissoudre le commandement militaires baathiste dans l'attente d'une refonte totale de l'Etat irakien) ont joué un rôle essentiel dans l'émergence de l'Etat islamique.

Ce phénomène, à lui seul, devrait nous amener à réfléchir. Pourquoi lorsqu'un mouvement jihadiste semble vaciller à un endroit donné, un autre prend le flambeau ailleurs ? Est-ce à dire que la militarisation de sa politique étrangère vers laquelle paraît se diriger la France est potentiellement génératrice de conditions favorables au renforcement de l'Etat islamique, voire à la naissance d'autres mouvements comparables ? Ni Poutine en Tchétchénie, ni Bush Jr en Irak, ni certains Etats arabes (Arabie Saoudite, Egypte, Algérie...) ne peuvent décemment affirmer que l'usage des armes a éteint le grondement jihadiste. Au mieux, ont-ils affaibli temporairement une offre idéologique qui repose indéniablement sur une base sociale qu'il s'agit de comprendre pour mieux cerner cet entrepreneur de violence qu'est l'Etat islamique.

Désigner ce dernier comme l'ennemi privilégié des principales puissances mondiales risque en effet de renforcer son aura plus que de le couper des populations sunnites qu'il s'est offert de protéger depuis que celles-ci subissent le contre coup de la revanche chiite en Irak après des années de dictature husseïnienne et du sectarisme assadien en Syrie. Bagdad, à titre d'illustration, ne compte plus aujourd'hui qu'une proportion de 12% de sunnites alors que ces derniers formaient près de la moitié de la population de la ville jusqu'à 2003. Ensuite, c'est lui apporter sur un plateau d'argent ce qu'il réclame, à savoir accéder au rang d'état incontournable, régulateur de fait par la violence d'une équation régionale qui ne saurait se résumer à la seule problématique jihadiste (trouble jeu de certains Etats, répression meurtrières contre les peuples désireux de se libérer, instrumentalisations religieuses et identitaires croisées, contradictions et lâchetés occidentales...). Enfin, étant donné qu'il serait naïf de supposer que les opérations militaires viseraient exclusivement cet ennemi, il convient d'évoquer le risque d'une identification croissante à ce dernier de la part de personnes à l'intérieur et à l'extérieur de la Syrie à mesure que les images de victimes innocentes déchiquetées par les bombardements vont être relayées dans les médias. Pour quelles raisons, à ce titre, peut-on mettre en garde contre l'intervention russe, et non celle de la France ?

Par ailleurs, nous nous trouvons dans une région du monde où la dichotomie ami/ennemi n'est peut-être pas opérante. Comment qualifier, en effet, certains acteurs du jeu moyen-oriental tels que l'Arabie Saoudite, l'Iran, la Turquie ? Le régime des mollahs est-il un partenaire, un adversaire, un associé dans la lutte contre Daech? S'il peut tactiquement user de son influence sur Bachar al-Assad, il est également l'acteur sans lequel les milices chiites irakiennes n'auraient pu martyriser la forte minorité sunnite irakienne, la mettant ainsi de fait dans les meilleures dispositions pour accueillir la protection jihadiste. Comment, en outre, traiter avec des puissances dont une partie des élites craint d'abord et principalement l'Etat voisin quitte à tolérer, voire encourager l'émergence de l'Etat islamique ? D'ailleurs, la France estime-t-elle réellement qu'il est de son intérêt de s'éloigner des monarchies du Golfe, aussi bien acteurs incontournables en vue d'une stabilisation relative de la région que pompiers pyromanes de l'embrasement qui se joue sous nos yeux. Ne pas trancher ces questions ne revient qu'à annuler les gains au demeurant hypothétiques d'une militarisation de l'action française dans cette partie du monde. Au Moyen-Orient, les structures des différents conflits s'entremêlant sous nos yeux rendent peu seyante la dichotomie schmittienne.

De plus, quelle serait la nature de cette guerre ? Si nous n'insisterons pas sur son coût financier (quid des restrictions budgétaires récurrentes ayant touché l'armée depuis de nombreuses années) et philosophique (jusqu'à quand les Français se diront disposés à accepter une législation d'exception théoriquement destinée à les protéger ?), il faut néanmoins définir les contours de cette opposition qui s'annonce. Conflit uniquement militaire ? Guerre idéologique ? Métaphysique ? Cosmique ? Lorsque l'on observe présupposés et conditions à partir desquels les débats impliquant l'islam et les musulmans (pourtant de loin victimes premières du terrorisme) se sont agencés ces dernières années, on peut difficilement affirmer que les Français sont aujourd'hui plus sereins par rapport à ces sujets qu'il y a quinze ans. De surcroît, pour qui observe la "théologisation", voire la "coranisation" du débat qui a cours aujourd'hui, il y a lieu d'anticiper un mélange des genres non seulement nuisible à l'esprit d'unité que certains espèrent insuffler à l'ensemble des Français sans distinction, mais surtout stérile puisque l'origine de la violence tient aux recompositions politiques qui se font au détriment des sociétés arabes depuis plusieurs décennies, et qui se répercutent sur certains groupes en Europe partageant avec celles-ci un certain imaginaire.

Enfin, et c'est certainement là l'argument le plus aigu, décider une guerre revient à s'inscrire dans une temporalité bien précise. Si l'on a vu que porter les coups les plus durs à Daech serait loin de garantir son élimination, est-il alors possible d'envisager une forme d'armistice, ce qui représente, à tout le moins théoriquement, la finalité d'une entrée en guerre ? Une configuration où l'ennemi renaîtrait un jour ou l'autre parce qu'il remplit une fonction régionale (presque tous les Etats ayant comme cible prioritaire une autre entité que l'Etat islamique) et qu'il repose sur une base sociale solide (les populations sunnites irakienne et syrienne mises en danger par le nouveau type de régulation confessionnelle et ethnique qui prévaut désormais au Moyen-Orient) met de manière structurelle la France dans l'impossibilité de remplir ses objectifs. Dès lors, déclarer une guerre au terrorisme, alors qu'il est question d'un procédé politique pour atteindre des objectifs et non d'un ennemi en soi, tout en reconnaissant l'impossibilité d'un Yalta qui acterait de manière officielle et acquise la fin du jihadisme, ne revient qu'à donner la maîtrise du calendrier et du symbole à l'acteur que l'on se propose de détruire. Dans une équation stratégique du fort au faible, le premier peut décider de la nature et de l'intensité du conflit, mais le second, en donnant l'impression de pouvoir frapper quand et où il souhaite, signale qu'il est toujours capable de se projeter dans le temps, qui plus est lorsqu'il est capable d'atteindre par des petits groupes organisés la plupart des Etats contre lesquels il décidera d'agir. N'importe quelle action (terroriste ou non) entreprise contre la France et ses alliés mettrait alors le chef de l'Etat, devenu chef de guerre, dans l'obligation de reconnaître son incapacité à venir à bout de l'ennemi, contribuant ce faisant à surinvestir la rhétorique guerrière et entretenir un état d'exception politique et moral qui n'est ni plus, ni moins que l'objectif recherché par ceux que l'on croit pourtant ainsi annihiler.

Alors qu'il doit affronter le régime Assad (devenu milice parmi d'autres), le Hezbollah, les kurdes, les forces armées iraniennes, les milices irakiennes et afghanes, nombre de pays arabes (Jordanie...), de plus en plus la Turquie, la Russie, la Grande-Bretagne, la France, le Canada (jusqu'à l'élection de Justin Trudeau) et les Etats-Unis, Daech parvient encore à s'étendre en certains endroits malgré de sérieux revers. C'est donc qu'un terreau favorable rend propice l'identification à cet aspirant-Etat de la part de populations craignant bien davantage d'autres acteurs que le mouvement jihadiste. Il n'est donc pas qu'un entrepreneur de violence. Il remplit une fonction sociale et politique, voire symbolique. Sinon, comment serait-il passé en moins de deux années d'effectifs évalués à environ 7000 combattants à un nombre avoisinant les 50 000, dont une moitié au moins de personnes extérieures à la Syrie et l'Irak, dont parmi eux 50% d'occidentaux ? A ces questions, il semblerait que l'emploi d'une éthique de la guerre soit largement insuffisante, et même contre-productive tant DAECH semble transformer en ressource toute stratégie non adaptée pour l'affaiblir. On ne répond tout simplement pas à des enjeux de recomposition sociale et identitaire par l'action armée prioritairement. Si d'après Carl Schmitt, la guerre est la décision politique par essence, l'analyse du Moyen-Orient contemporain nous pousse à nous demander si relativiser son utilité ne l'est pas moins.

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