L'ancienne directrice adjointe de L'Obs règle ses comptes dans un livre
Il est question d'un journal appelé L'Obsolète, dont la figure tutélaire est "Jean Joël" et le directeur de la rédaction "Matthieu Lunedeau". Ancienne directrice adjointe de L'Obs, licenciée de ses fonctions fin mai, Aude Lancelin règle ses comptes dans "Le monde libre", un livre à clefs à paraître mercredi.
"Pas une phrase, pas un fait (relatés dans ce livre) n'ont été inventés ou même déformés", assure dans l'ouvrage Aude Lancelin qui reconnaît cependant avoir modifié les noms de ses anciens collègues.
Publié par Les liens qui libèrent, "Le monde libre" bénéficie d'un tirage de 14.000 exemplaires.
La journaliste qui se revendique de gauche et affiche sa proximité avec le philosophe marxiste Alain Badiou, fustige pêle-mêle "la décadence" du métier de journaliste, la "police intellectuelle" et "un socialisme d'appareil à l'agonie".
Son constat est sévère, ses portraits sont assassins. Les trois actionnaires de L'Obsolète sont croqués avec une rare cruauté.
"L'un devait sa fortune colossale à la haute couture (...) et ne se distinguait plus guère publiquement que par le mécénat de prix littéraires", écrit Aude Lancelin qui évoque également "un banquier d'affaires à l'intelligence très vive" qui "s'enthousiasmait pour des caudillos de la gauche radicale (...) et passait néanmoins sa vie à se couler amoureusement dans les circuits de l'argent". Le troisième homme (qui obtiendra sa tête) c'est "l'ogre venu des télécoms".
Jamais ils ne seront cités mais on pense évidemment au trio d'actionnaires de L'Obs, Pierre Bergé, Matthieu Pigasse et Xavier Niel.
Aude Lancelin n'est pas tendre à l'égard de ses confrères prêts "à avaler n'importe quoi" ou des intellectuels comme Bernard Henri-Lévy (nommément cité), "sentencieux maître à penser de L'Obsolète". Déjà en 2010, raconte Aude Lancelin, un de ses articles se moquant de l'auteur de "La barbarie à visage humain" manqua de provoquer son licenciement du journal.
Mais c'est évidemment à l'égard des dirigeants socialistes qu'elle se montre la plus pugnace. Depuis les années 1980, la gauche gouvernementale "férocement libérale" s'est "délibérément vendue au capitalisme financier", déplore-t-elle. Le Premier ministre Manuel Valls est un "petit homme colérique aux idées simples".
"Si être +de gauche+ ne consistait pas à défendre le faible contre la myriade d'exploitations variées que le fort était en train de réinventer, qu'est-ce que cela pouvait donc bien être encore?", s'interroge Aude Lancelin, qui affirme avoir dénoncé, quasiment seule au sein de sa rédaction, la loi travail. Or, souligne-t-elle, "la gauche radicale a toujours été le seul ennemi véritable à L'Obsolète".
Son licenciement "d'une agressivité telle qu'on en voyait seulement dans un monde vorace (...) où il était de bonne pratique de monter à la hâte des dossiers pour briser les récalcitrants" deviendra inéluctable.
Elle affirme être sortie "entièrement transformée mais non brisée" de cette épreuve. "Moins résignée et plus hérétique que jamais."