Emmanuel Macron a-t-il bien fait d'accepter l'offre de François Bayrou?
PRESIDENTIELLE - Il l'a appelé de ses voeux. Et l'a obtenue. La proposition d'alliance faite par François Bayrou à Emmanuel Macron ce mercredi 22 février est une bonne nouvelle pour l'ancien ministre de l'Economie qui l'a immédiatement acceptée. Quelques heures après l'annonce du ralliement de François de Rugy, participant de la primaire PS, ce choix fait par le triple candidat à la présidentielle ravit les lieutenants d'Emmanuel Macron. "C'est un acte courageux, un acte inédit, à la hauteur de la situation que connaît notre pays", a salué Richard Ferrand, secrétaire général d'En Marche.
Il n'y aurait donc pas l'ombre d'un doute. Emmanuel Macron a bien fait d'accepter ce ralliement qui résonne comme un coup de tonnerre dans cette campagne présidentielle. "Un tournant", comme l'a qualifié le candidat lui-même.
Il est vrai que le leader d'En Marche! est celui qui avait le plus à perdre d'une candidature du maire de Pau qui aurait marché sur ses plate-bandes centristes. Dans les intentions de vote, c'est à lui que François Bayrou prenait le plus d'électeurs potentiels. Accepter cette alliance lui épargne non seulement un rival mais cela peut retourner une dynamique qui avait été enrayée au cours de ces derniers jours.
Infographie réalisée par La Fondation Jean-Jaurès sur la base des données issues de L'enquête électorale française : comprendre 2017 (vague 11, février 2017) réalisée par Ipsos et le Cevipof.
"Dire que ça bousculera le jeu n'est pas une certitude dans la mesure où les enquêtes d'opinion faites avant sa déclaration donnaient la même hiérarchie selon que François Bayrou était testé ou pas", nous confiait avant cette alliance Jean-Daniel Lévy, directeur Opinion d'Harris Interactive.
Un atout au service du vote utile
Sur le fond, cependant, les deux hommes avaient (presque) tout pour s'entendre. Les conditions formulées par François Bayrou n'ont par exemple rien de rédhibitoire pour un candidat qui met la dernière touche à son "contrat avec la nation". Emmanuel Macron a annoncé l'ajout prochain d'une loi sur la moralisation de la vie publique. D'ici au 2 mars, jour de présentation de son projet, il va aussi devoir préciser les contours de la proportionnelle qu'il souhaite introduire dans les législatives et dont François Bayrou fait une exigence.
Même si François Bayrou récuse le terme de ticket, ce soutien de poids va aussi contribuer à crédibiliser Emmanuel Macron dont certains continuent de douter de la capacité à diriger le pays. "Bayrou est une personnalité en qui les Français ont confiance et il est l'une des plus appréciées. C'est un homme politique considéré comme respectable", reprend Jean-Daniel Lévy. Le maire de Pau a d'ailleurs lui-même joué sur cette corde en se portant comme "le garant" de la future loi sur la moralisation de la vie publique qui est l'un des marqueur de sa vision.
Au regard du discours très dur de François Bayrou sur François Fillon et sur la menace que représente l'extrême droite, Emmanuel Macron compte aussi sur l'alliance pour apparaître comme le meilleur rempart face à Marine Le Pen. Dans une élection où la présidente du FN est à un niveau historiquement haut, il espère activer ainsi le ressort du "vote utile" en sa faveur.
"La goélette Macrou n'a pas de cap"
Il lui faudra tout de même composer avec le fait que l'ancien ministre de l'Education de Jacques Chirac, élu pour la première fois en 1982 n'incarne pas exactement le renouvellement de la classe politique qu'il souhaite.
Ce n'est pas le seul écueil qu'Emmanuel Macron va rencontrer en acceptant cet attelage. Jusqu'à présent, il a toujours refusé les marchandages partisans. Le soutenir signifiait un ralliement inconditionnel, ce qu'ont fait par exemple les anciens élus Modem Corinne Lepage et Sylvie Goulard. En acceptant l'offre de François Bayrou et donc les conditions qui allaient avec, le candidat est contraint de transiger une première fois sur ses principes.
Il ouvre de fait la voie à des critiques sur sa manière de faire de la politique "comme les autres" alors qu'il apparaissait comme le candidat qui dit non aux négociations d'appareils.
Ce tandem offre enfin à la droite un nouvel angle d'attaque. Il n'y a d'ailleurs qu'à voir la rapidité avec laquelle les équipes de François Fillon ont réagi pour s'en convaincre. Quelques minutes seulement après la conférence de presse de François Bayrou les fillonistres ont relayé avec vigueur les déclarations de celui-ci quand il critiquait Emmanuel Macron. Ils se plaisent aussi à rappeler que le maie de Pau avait appelé à voter Hollande en 2012, ce qui confirme selon eux l'ex-ministre de l'Economie en héritier du président sortant.
Donc #BAYROU propose un accord à #Macron, qu il qualifiait "de candidat des forces de l'argent" #Bayrou2017
— Thierry SOLERE (@solere92) 22 février 2017
Aujourd'hui soutenir l'ancien banquier d'affaires ne semble plus poser de problème à l'élu du Modem #Bayrou #Macron pic.twitter.com/hDkpYANz4H
— Bernard Accoyer (@BernardAccoyer) 22 février 2017
Soutien à Hollande en 2012 et offre d'alliance à #Macron en 2017. Définitivement, #Bayrou et le #MoDem penchent à gauche !
— Laurence Arribagé (@LArribage) 22 février 2017
François #Bayrou rejoint #Macron, il vote #Hollande une seconde fois.
— Valérie Boyer ن (@valerieboyer13) 22 février 2017
"Avec deux girouettes aux deux mâts, la goélette "Macrou" n'est pas prête de trouver le bon cap", a résumé Jérôme Chartier, conseiller spécial du candidat de droite. Comme un prélude aux déclarations que l'on va entendre dans les deux mois qui nous séparent du premier tour.
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