Whirlpool: Selfies ou contestation, Le Pen ou Macron, qui a gagné le match des images à Amiens?
PRÉSIDENTIELLE - Cette campagne n'avait pas encore vraiment commencé. Et puis, il y a eu l'épisode Whirpool, du nom de cette usine d'Amiens menacée de fermeture et qui s'est brusquement invité dans l'entre-deux tours. Marine Le Pen et Emmanuel Macron se sont succédé sur le parking, dans deux atmosphères différentes, avec deux stratégies que tout oppose.
Dans ce match à distance qui s'est joué à coups de selfies, sifflets et mégaphone, il est cependant bien difficile de savoir qui a remporté la partie.
À la mi-journée, pourtant, le duel semblait plier puisque la candidate du Front national avait parfaitement réussi son coup de com' tenu secret pendant la matinée. Seuls quelques militants qui tractaient devant l'usine et distribuaient des viennoiseries aux grévistes avaient été informés de la visite inopinée de leur championne. C'est sous les applaudissements des salariés et de ses militants que la leader d'extrême droite a été accueillie.
Quand Le Pen tend le piège parfait
Durant la vingtaine de minutes qu'elle aura passée sur place, Marine Le Pen n'a essuyé aucun propos hostile multipliant même les photos avec les personnes présentes dont il était difficile de savoir s'il s'agissait de salariés ou de militants.
Mais peu importe, les images étaient belles et la candidate qui capte déjà plus de 60% du vote ouvrier (sondage Ifop publié mardi soir) avait tendu un piège parfait à son rival.
Pendant qu'elle souriait au milieu des Amiénois sans toutefois formuler aucune proposition pour l'avenir du site (elle les a envoyées dans l'après-midi par communiqué), Emmanuel Macron était à la Chambre de commerce et d'industrie. À quelques kilomètres de l'usine, il s'entretenait à huis clos avec des représentants de l'intersyndicale. Le choc des images, diffusées sur les chaînes d'info en continu, était alors terrible, l'ancien ministre de l'Economie auteur d'un début de semaine plus que poussif ponctué par des polémiques, comme celle consécutive à sa soirée à la Rotonde.
joie vs malaise pic.twitter.com/47XpIM9xY2
— Nabil Touati (@salam93) 26 avril 2017
Emmanuel Macron comptait pourtant beaucoup sur ce déplacement dans sa ville natale. Absent pendant 48 heures, il voulait relancer la machine, dans une région où sa rivale est arrivée très nettement en tête dimanche.
Problème, lors de "L'émission politique" début avril sur France2, il s'était engagé à ne faire aucune "démagogie" et ne pas instrumentaliser le drame social vécu à Amiens. Impossible donc d'aller devant l'usine au risque de se renier. Voilà pourquoi il avait fait le choix de la rencontre en terrain neutre.
Au cours de cette réunion, l'idée d'un déplacement sur place a tout de même germé, comme son équipe a tenu à le faire savoir dans un tweet. Elle a pris corps après la visite surprise de Marine Le Pen. Et tant pis pour le revirement.
12h30 avec l'intersyndicale du site Whirlpool. Loin des manipulations, je serai avec les salariés à 14h30. pic.twitter.com/w5kN6mxbrK
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 26 avril 2017
Macron obligé de renier une promesse
Mais quand aux environs de 15 heures, le vainqueur du premier tour est arrivé sur les lieux, l'ambiance est devenue tout de suite plus lourde que deux heures plus tôt pour Marine Le Pen.
Devant une meute de journalistes encore plus dense que lors d'un déplacement présidentiel, ce sont des sifflets, des huées et des insultes qui ont accueilli Emmanuel Macron. Entamer un dialogue. C'est pourtant bien dans ce but que le candidat avait dérogé à la règle qu'il s'était fixée.
Il a même débuté son discours mégaphone à la main (et non hygiaphone comme il l'avait réclamé) juché dans le conteneur que l'émission "Envoyé Spécial" avait installé pour enregistrer son l'émission diffusée jeudi soir sur France2.
Décision est tout de même prise de poursuivre l'échange à l'abri des caméras, pour tenter d'entamer ce dialogue. Son équipe a alors fourni clé en main les images en diffusant cet échange sur Facebook. Mais il ne débute pas sous les meilleurs auspices. "La réponse n'est pas la suppression de la mondialisation, ni la suppression des frontières. Ne vous trompez pas de combat", a-t-il lancé aux salariés de Whirlpool, particulièrement remontés contre ce symbole du "business", comme l'a décrit une employée.
Encaissant les coups, Emmanuel Macron est toute de même resté au milieu des grévistes, qui ne manquaient pas de mordant. "On est des ouvriers, on a les mains propres, vous nous serrez la main?", lui a lancé une salariée du site. "Avoue qu'il était mauvais Hollande!", l'a interpellé un autre. Pour autant, et malgré cette ambiance très tendue, le candidat d'En Marche! est parvenu à plusieurs reprises à instaurer un dialogue.
Ce que les électeurs retiendront
Celui-ci a surtout pris corps en fin d'échange quand François Ruffin s'est invité dans la discussion. Ces cinq minutes avec le réalisateur, candidat de la France insoumise aux législatives, ont parfaitement résumé la problématique d'Emmanuel Macron.
"Je salue votre courage d'être venu malgré tout, au milieu de la mêlée, comme ça", a débuté l'auteur du documentaire "Merci Patron" qui n'a pas manqué d'interpeller le candidat sur sa vision de l'économie et sa défense de la mondialisation.
Tout est donc de savoir ce que les électeurs retiendront de cette journée: les belles images de Marine Le Pen (mais l'absence de proposition pour le site) ou le courage d'Emmanuel Macron (mais la grosse contestation qu'il a dû affronter).
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