Venezuela: le chef de l'opposition nie toute "violence" de son camp
Si nous étions violents, nous aurions déjà fait tomber le gouvernement", déclare dans un entretien exclusif à l'AFP le chef de l'opposition vénézuélienne Henrique Capriles, ajoutant apercevoir le "dénouement" de la crise qui secoue son pays.
Le gouvernement socialiste du président Nicolas Maduro joue ses "dernières cartes", assure cet homme politique de 44 ans, le visage marqué après plus d'un mois de manifestations et de violences qui ont fait une trentaine de morts.
QUESTION: Que cherche Nicolas Maduro avec sa proposition d'assemblée constituante?
REPONSE: "Il ne veut pas d'élections, voilà l'explication. Comme le gouvernement ne peut pas gagner les élections, il veut démonter la manière dont elles sont organisées. Il y a quelques semaines ils (l'équipe Maduro, ndlr) parlaient (du texte actuel comme) de la meilleure Constitution du monde et aujourd'hui ils disent qu'ils faut en faire une nouvelle pour stopper les processus électoraux et annuler ceux qui étaient prévus", les scrutins régional et municipal.
Q: Vous avez affirmé que la désignation de l'assemblée constituante se ferait selon un système électoral similaire à celui de Cuba. Pourquoi?
R: "Car ce ne sera pas une élection démocratique, universelle, directe et (avec un vote) secret (...). (Maduro) dit que 50% (des membres) viendront de secteurs de la société. Tous les Vénézuéliens savons que cela signifie qu'ils viendront (d'institutions) aux mains du PSUV (le parti socialiste au pouvoir, ndlr). Il veut une Constitution qui lui permette, même sans avoir de majorité populaire, de se maintenir au pouvoir."
Q: Participerez-vous à ce processus?
R: "Je ne vais participer à aucun des scénarios proposés (...). Le pays entrerait dans une situation très compliquée, avec deux constitutions, une en vigueur et l'autre frauduleuse. (Avec) une Constitution qui soit le résultat d'une minorité souhaitant imposer ses règles, le gouvernement tombe."
Q: Maduro semblait être dos au mur après des semaines de manifestations, et maintenant il prend cette initiative. Est-ce que cela fera baisser l'intensité de la mobilisation?
R: "Je ne sais pas combien de temps vont durer les manifestations. Ce que je peux dire, c'est que je vois une fermeté admirable dans la population. Si nous étions violents et non démocrates, nous aurions déjà fait tomber le gouvernement."
Q: Comment?
R: "Avec tout le monde. Imaginez-vous un million de personnes dans les rues, si elles étaient violentes et voulaient faire un coup d'Etat, nous aurions déjà fait tomber le gouvernement (...). Le Venezuela va vers un dénouement, cela est insoutenable. C'est un gouvernement qui s'isole du monde démocratique, sans capacité de financement, sans ressources, avec l'inflation et la pénurie les plus élevées du monde. Comment tient Maduro? Cela (les manifestations) va se poursuivre jusqu'à ce que le pays ait une solution."
Q: D'où peut venir cette solution?
R: "Comme toujours, de la pression en interne et à l'international."
Q: Mais la répression semble augmenter.
R: "Je vois ça comme une manoeuvre. Maduro joue ses dernières cartes. Il met (dans la rue) les personnes les plus radicales, je doute même que ceux exerçant la répression fassent partie de la garde nationale ou de la police."
Q: Il s'agirait d'étrangers?
R: "Non, de personnes sans scrupules."
Q: A quoi sert le soutien international?
R: "A avoir un monde démocratique qui dise: il y a une rupture de l'ordre constitutionnel, nous n'allons pas continuer à être permissifs, vous n'allez pas continuer à utiliser les instances internationales comme un endroit pour vous réfugier (...). Je vois une combinaison très forte de la communauté internationale démocratique et du peuple vénézuélien."
Q: Que va-t-il se passer maintenant?
R: "Nous allons continuer de mettre la pression, persister en organisant et en agitant tout le pays, nous ne pouvons pas rester seulement à Caracas."
Q: Vous avez été récemment déclaré inéligible pour 15 ans. Qu'allez-vous faire?
R: "Que je puisse ou non être candidat, ce n'est pas quelque chose qui m'empêche de dormir. Mon problème est que le Venezuela change et je suis convaincu que ce pays va changer."