"On a une forte demande, sans l’offre en face" : la Haute-Loire s'attelle à la problématique des logements vacants

Selon une étude publiée en janvier par l’Insee, la Haute-Loire se classe 6e parmi les départements de France métropolitaine où le taux de vacance des logements est le plus important (12,4 %). Ce phénomène, qui s’explique par de nombreux facteurs, est - enfin - pris à bras-le-corps par les pouvoirs publics altiligériens.

La problématique des logements vacants s’accentue en France, en Haute-Loire ainsi que dans le Brivadois. Entre 2014 et 2020, le taux de logements vacants n’a d’ailleurs baissé que de 0,1 % à Brioude (15,1 contre 15,2 %). Le maire adjoint de Brioude à l’urbanisme, travaux et cadre de vie, Maurice Roche, loin d’être en désaccord avec ce constat, complète cette donnée avec une étude plus récente, et plus flatteuse, qu’il feuillette sur son bureau. "L’étude menée par Urbanis fait ressortir un taux de logement vacant de 10,3 % au 28 novembre 2023".

Malgré cette potentielle amélioration sur la commune depuis quatre ans, le souci posé par les logements vacants reste d’actualité.

Dans l’analyse de ses chiffres, l’Insee partage que "la part de logements vacants est plus forte dans les espaces les moins denses en population". L’exode rural se poursuit-il ? Plus personne ne veut s’installer en Haute-Loire ? Les logements à Brioude peinent-ils à se vendre ? Non, non et non.

Les entreprises et les particuliers veulent s’installer sur le Brivadois

Les agents immobiliers interrogés assurent qu’il faut écarter cette hypothèse. Benjamin Sabatier, directeur de Mon @gence immobilière à Brioude, qui juge ces chiffres frustrants, n’a aucune location vide. "Les entreprises et les particuliers veulent s’installer sur le Brivadois. On a une forte demande sans l’offre en face."

Un constat partagé par Marie-Cécile Roche, directrice de l’agence immobilière Roche à Brioude et déléguée Fnaim en Haute-Loire. "Il y a eu une accélération des ventes avec les années Covid. Tout s’est vendu, même la moindre maison dans un coin reculé. Puis, des communes avec une offre importante, ce sont des lieux d’installation pour les entreprises, donc la création d’un bassin d’emploi, donc une démographie à la hausse, donc des nouveaux commerces, donc des écoles ouvertes, etc."

Alors, comment peut-on expliquer les 12,4 % de logements vacants en Haute-Loire, si la demande est toujours plus importante ? Plusieurs facteurs sont avancés : le coût des travaux, la remise aux normes énergétiques pour avoir un DPE correct, un habitat laissé à l’abandon à la suite d’une succession, l’explosion de la recherche de logements meublés, la dégradation du profil de locataires…

Les volets de nombreuses maisons dans Brioude sont fermés depuis fort longtemps.Mais l’un d’entre eux revient unanimement : de nombreux habitats vacants ne correspondent pas à une demande plus exigeante. "Ils recherchent des biens différents par rapport à avant comme une bonne isolation thermique, du terrain, un environnement sécurisé, un logement moderne et bien équipé", liste Marie-Cécile Roche, membre du conseil d’administration de la chambre Fnaim Auvergne.

Les pouvoirs publics souhaitent donc se concentrer sur ce volet. C’est déjà le cas pour la ville de Brioude avec "la reconquête à l’habitat vacant" (voir ci-dessous).

Lancé en 2016 par la ville de Brioude, le projet de reconquête de l’habitat vacant concerne les logements inoccupés depuis plus de deux ans dans le centre-ville. "On a réuni les banques, les agences immobilières et les notaires pour connaître la tendance du marché et le type de logement, confie Maurice Roche, maire adjoint à l’urbanisme, travaux et cadre de vie. Sur cette base, on a modulé nos aides à la rénovation des logements vacants." Pour les F1 et F2, c’est 15 % des montants hors taxes des dépenses (isolation, électricité, chauffage, peinture…) et 20 % pour les F3 et plus. La subvention donnée par la commune est plafonnée à 10.000 € maximum. La Ville de Brioude ajoute une aide supplémentaire de 1.500 € à 50 % des montants hors taxes pour les honoraires de la maîtrise d’œuvre. Une aide de 1.000 € est aussi donnée par emplacement de stationnement conçu sur le domaine privé. "En 7 ans, il y a 83 logements qui ont été rénovés ou qui sont en rénovation. Ce qui représente 3.800.000 € de travaux. La commune a donné 490.000 € de subvention, soit 13 % du coût des travaux", précise Maurice Roche. La Ville de Brioude s’est fixé l’objectif de contribuer financièrement à la réhabilitation de 175 logements vacants entre 2023 et 2033. "Depuis le début de l’année, on a déjà rentré six ou sept logements", assure l’adjoint au maire.

Toutefois, Maurice Roche a conscience que ces mesures incitatives devront s’accompagner de décisions coercitives dans le temps. "Quand les personnes partent d’un logement après 30 ou 40 ans de location, les propriétaires laissent le logement vide, car il n’est plus du tout aux normes. À ce niveau-là, on compte sur les mesures des Offices publics de l’habitat (OPH), notamment celles qui sont plus contraignantes, comme des obligations sur certains bâtiments."

Brioude n’est pas la seule commune à passer à l’action : c’est tout le département qui se mobilise depuis quatre ans (post Covid-19). Les pouvoirs publics du département considèrent les logements vacants comme un véritable enjeu d’avenir.

Fabienne Camus, directrice déléguée habitat du département de la Haute-Loire, a été mise à la tête des opérations. "Il y a un besoin de logements afin de répondre aux besoins des territoires pour des questions de regroupement, de proximité avec les zones d’emplois. Il y a aussi un enjeu autour des offres locatives. Un logement qui reste vacant est un logement qui se dégrade ou qui l’est déjà. Il suffit de traverser certaines rues pour voir que des immeubles ou des maisons qui se dégradent impactent les logements voisins. Et cela fonctionne donc à l’inverse. Il faut repenser écologiquement les villes et les villages de demain."

Les pouvoirs publics altiligériens veulent pousser les propriétaires de logements vacants à louer ou à vendre.Le département, qui dispose d’une double compétence (solidarité humaine et solidarité territoriale), travaille désormais main dans la main avec l’État, notamment sur des dispositifs afin d’accompagner ces collectivités.

"Aujourd’hui, on est au stade des études. Elles peuvent permettre d’accéder à des aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Tout cela nécessite des études de faisabilité sur plusieurs communes du département", confie Fabienne Camus. Les communautés de communes sont aussi de la partie. "Une opération d’amélioration de l’habitat a été signée pour Auzon communauté et les Rives du Haut-Allier sont en pleine étude et nous travaillons avec eux".

Toutes les autorités publiques s’emparent donc du sujet des logements vacants. On étudie la problématique. L’action concrète et généralisée sera pour plus tard.

Félix Mouraille