Une nouvelle extension du réseau de chaleur dans les tuyaux à Aurillac

Le chauffage biomasse montera en puissance à Aurillac. Les quartiers nord de la ville seront majoritairement concernés par une extension du réseau qui pourrait être opérationnelle en 2027. Les élus ont enclenché le processus en séance du conseil ce lundi 8 avril

Un cap a été franchi dans la volonté d’étendre et de densifier le réseau de chaleur bois de la ville d’Aurillac, déjà long de 22,7 kilomètres. Pas moins de 20 à 22,5 millions d’euros y seront consacrés pour ajouter plus de 9 km.

En approuvant le schéma directeur du réseau de chaleur biomasse élaborée par le cabinet d’études Kairos ingénierie lundi 8 varil en séance du conseil municipal (*), Aurillac Chaleur Bois (ACB), la filiale d’Engie Solutions qui gère la chaufferie opérationnelle depuis octobre 2020 à l’Yser, a désormais les coudées franches pour taper à la porte de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Elle avait bénéficié de 11,5 millions d’euros de cet établissement public sur un investissement total de 25 millions. ACB espère un soutien aussi fort, entre 40 et 50 %, pour cette extension chiffrée entre 20 et 22,5 M€. Ce délégataire supportera le coût des travaux et les investissements.

« Face à la demande croissante des raccordements et en l’état actuel des capacités du réseau, il n’est pas envisageable de concevoir de nouvelles extensions ou une densification sans dégrader la mixité bois-gaz. » Mireille Laborie, adjointe écologiste en charge du défi climatique et de la transition écologique, ne veut pas descendre en dessous du seuil des 85 % de chaleur renouvelable produite par la biomasse. Équipées d’un système gaz complémentaire pour les pics de production, les deux chaudières de l’Yser utilisent essentiellement le bois pour fournir le chauffage des bâtiments et l’eau chaude sanitaire.

Une seconde chaufferie, d’une puissance de 8 MW, devrait être implantée à proximité du cimetière, sur l’ancienne décharge de Toulousette. Cette friche, propriété de la ville, présente plusieurs avantages. L’ouvrage sera éloigné des habitations, facile d’accès pour les poids lourds qui livreront le bois et proche du futur réseau, à savoir les quartiers nord de la ville, même si la construction de cet équipement devrait se réaliser sur des pieux, comme une plateforme pétrolière, en raison de son implantation sur une décharge.La seconde chaufferie, d’une puissance de 8 MW, devrait être implantée sur l’ancienne décharge de Toulousette, propriété de la ville. photo jérémie fulleringerMarie-Josée Ortigues (opposition de droite) a abordé le volet écologique, et plus précisément la consommation de 32.000 tonnes de bois par an dans les deux chaufferies :

Les habitants du Cantal s’inquiètent des coupes de plus en plus nombreuses de nos massifs forestiers et de l’industrialisation de nos forêts. Nous savons que la combustion du bois émet trois fois plus de CO2 que la combustion de gaz naturel. Notre crainte aujourd’hui est que cet investissement, qui devrait être un investissement pour l’avenir, soit une hypothèque sur l’avenir

Sur le papier, le bois reste une aubaine pour se soustraire aux énergies fossiles, a estimé Stéphane Fréchou (Écologistes, majorité) : « La forêt croît, à peu près, de 7 m3 par an et par habitant dans le Cantal. Aujourd’hui, on en consomme 3 m3. Une des premières façons de lutter contre le dérèglement climatique, c’est de se détourner des énergies fossiles. L’éolien, le solaire et la biomasse sont les énergies les plus vertueuses pour le climat. On n’a pas de souci d’approvisionnement pour le bois de chaleur dans le Cantal. Quand on brûle du bois, on émet des particules fines. Mais quand on brûle du fioul, quand on brûle du gaz, quand on importe du gaz de Russie, on a d’autres désagréments qui sont bien plus gênants à gérer. » Selon les données fournies par ACB, les rejets de 21.300 tonnes de CO2, après la prise en compte des émissions générées par le transport du bois, auraient été évités en 2 ans avec la chaudière bois de l’Yser (18.100 tonnes par an avec les deux chaudières, NDLR).

Jamel Belaidi (opposition de droite) a interpellé la majorité sur le rayon d’approvisionnement en bois du réseau de chaleur. Une distance moyenne de 32 km en 2022 et de 31 km en 2023 lui a indiqué Mireille Laborie. Le conseiller de droite a fait part de ses inquiétudes « sur des difficultés d’approvisionnement en bois et sur une guerre des prix entre les coopératives forestières et les exploitants forestiers » avec la multiplication des réseaux de chaleur et « le projet avancé d’une usine de pellets » dans les environs de Nieudan.Aucun affolement sur la ressource en bois pour le maire PS Pierre Mathonier :

Le stock est de 31 millions de m3 dans le Cantal, il progresse d’un million par an. L’énergie bois est écologique et moins chère de 20 % que le gaz ou le fioul. Les préoccupations écologiques sont devant nous, il me semble judicieux d’étendre ce réseau de chaleur biomasse

Les travaux pourraient être lancés fin 2025, ce qui augure une longue série de tranchées creusées dans les artères du nord de la ville et de déviations. La mise en service de l’extension et de la densification du réseau de chaleur serait envisagée en 2027. (*) Marie-Josée Ortigues est la seule élue à s’être abstenue lors du vote du schéma directeur du réseau de chaleur biomasse.

Majoritairement dans les quartiers nord

L’extension envisagée concernera principalement les quartiers nord d’Aurillac, avec 6,7 km de réseaux déployés sur un total de 9,2 km.La Ville a fléché trente-sept bâtiments pour une énergie livrée d’environ 15 GWh par an par la future chaufferie, soit la fourniture en chauffage et eau chaude sanitaire à l’équivalent de 1.500 logements. Le lycée agricole, l’IUT, le lycée Monnet-Mermoz, trois Ehpad, trois résidences sociales et quatre autres privées, Agrolab’s, Europan, le château de Saint-Étienne, le marché couvert, les écoles des Alouettes et de la Fontaine figurent dans cette liste qui pourra évoluer lors de la phase de commercialisation menée par ACB, certainement lancée en 2025, après la signature de l’avenant avec la municipalité attendue pour cette fin d’année.

Dans une moindre mesure, le réseau sera étendu de 1,8 km dans le secteur ouest de la ville. Une dizaine de bâtiments ont été identifiés pour une énergie livrée de 2,6 GWh par an, dans le périmètre de l’avenue de Conthe : l’école de Belbex, l’entreprise Piganiol, l’Adapei, le Service départemental d’incendie et de secours…Les réseaux hydrauliques des deux chaufferies seront indépendants. Ils seront complémentaires sur le plan thermique, ce qui permettra de densifier l’actuel réseau de chaleur. Dix-neuf bâtiments (le collège Jules-Ferry, huit résidences privées…) ont été ciblés pour une énergie livrée de 6 GWh par an. La construction de cette seconde chaufferie permettra de grimper à 90 % de production biomasse et donc d’être moins dépendant au gaz. 

Pierre Raynaud