Attaque au couteau, à Sydney : l'un des deux héros français est originaire de Clermont-Ferrand, il raconte
Silas Despreaux, installé en Australie depuis 6 ans, est l'un des deux Français qui ont repoussé l'auteur de la tuerie du centre commercial de Sydney, le 16 avril dernier. "Nous étions dans un mélange de peur et d'action", témoigne-t-il.
La vie a repris normalement pour Silas Despreaux. Ou presque. Sera-t-elle vraiment la même après l'attaque au couteau qui a fait six morts dans un centre commercial de Sydney, le 16 avril dernier ? Un drame que ce jeune homme de 32 ans, originaire de Clermont-Ferrand, a vécu au plus près, le plongeant dans un tourbillon médiatique aussi intense qu'inattendu.
Installé en Australie depuis six ans, où il travaille dans une petite entreprise française spécialisée dans le bâtiment, l'Auvergnat est l'un des deux héros français qui ont fait face à l'assaillant. Lui et son ami, Damien Guérot, venaient de faire les boutiques dans le centre commercial en question. Ils se dirigent vers une salle de sport lorsque des passants commencent à s'agiter.
"Nous voyons un groupe descendre un escalator, sans que l'on comprenne ce qui se passe. Et puis, nous entendons une personne dire que quelqu'un met des coups de couteau."
Les amis se regardent. "On se dit : 'On y va'." Le duo se dirige alors vers l'agresseur. "On le voit avec ce couteau. À ce moment-là, je me mets dans une bulle. C'est difficile à expliquer, c'est comme un instinct de survie, un mélange de peur et d'action. Il me faut quelque chose pour me défendre, il faut que je lui fasse mal."
Ils saisissent des poteauxLes yeux de Silas Despreaux se portent vers des poteaux, qui se dressent devant un magasin. Lui et son camarade en prennent un chacun. "On m'indique que l'homme au couteau est à l'étage du dessous. Je l'aperçois et nous commençons à le suivre d'en haut.
"Arrivé en face d'un escalator, une femme est en train de remonter vers nous. L'assaillant est juste derrière elle. Je jette alors mon poteau sur lui. Je vois son regard noir, j'ai la sensation que maintenant, il va vraiment s'en prendre à moi."
Il décide alors de faire demi-tour. "J'essaie de voir ce que je peux prendre d'autres pour me défendre, sans m'apercevoir que Damien est encore sur place." Son ami brandit à son tour un poteau face à l'assaillant. Les deux Français ne le savent pas encore mais cette scène, immortalisée par des caméras de vidéo-surveillance, va faire le tour des réseaux sociaux et leur valoir une renommée internationale.
Le message d'Emmanuel MacronUne fois l'agresseur repoussé, ils sortent du centre commercial, orientent les policiers qui viennent d'arriver, assistent à la mort du tueur sous les balles de ces derniers puis cherchent une plage pour se poser et souffler. Le répit est de courte durée. Quelques heures après, dans la soirée, les voilà pris dans un nouveau vertige, tout aussi éprouvant. "Nous étions à un dîner avec des amis. J'étais sur Facebook et je vois la photo de Damien !"
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) April 16, 2024L'Australie tout entière veut savoir qui est ce courageux jeune homme qui a affronté l'assaillant. Les journalistes ne tardent pas à retrouver les deux Français. Première interview. "C'est un simple témoignage. Nous n'avons pas du tout conscience de l'ampleur que cela va prendre."
À savoir, des dizaines de sollicitations de la part des médias, les hommages à la pelle, la citoyenneté australienne offerte à Damien Guérot, alors surnommé "l'homme au poteau", les félicitations d'Emmanuel Macron à ces deux Français "qui se sont comportés en héros"...
"Ça fait bizarre, ce n'est pas tous les jours que ça arrive", sourit modestement Silas Despreaux. Éprouve-t-il une certaine fierté ? "Oui, mais parce que les gens nous le disent", relativise-t-il. Le Clermontois pense d'abord à toutes les personnes qui ont secouru les victimes. "Je les admire". Et il n'oublie pas l'horreur de cette attaque. "Il y a des gens qui sont décédés. Même si ce qu'on a fait, pour certains, c'est un beau geste, cela ne changera pas le fait qu'il y a eu des décès et que des familles sont en deuil. C'est à ces familles auxquelles il faut penser en priorité."
Messages de soutienSilas Despreaux n'est pas encore retourné sur les lieux de la tuerie. Il n'a pas encore idée du choc que cet événement peut présenter pour lui-même. Parmi tous les messages de soutien qu'il a reçus, il y a ceux, à des milliers kilomètres de Sydney, de ses amis auvergnats. "On va pas se le cacher, ça fait plaisir", apprécie-t-il. Humblement.
Olivier Choruszko