Quels vins vous recommandent nos journalistes ? Et pourquoi ?
Les journalistes de la rédaction les ont testés et approuvés. Voici de nouveau quatre vins qui les ont conquis et pourquoi. Bonne dégustation !
Retrouvez la sélection des vins qu'ont testés et aimés les journalistes de la rédaction :
Aux anges chanceuxTout d’un grand. Son père avait rapidement vu leur potentiel. Deux parcelles situées juste en face du domaine, à Fleys (dans l’Yonne), sur le même coteau que le chablis premier cru Les Fourneaux. Dont la classification par l’INAO en chablis village s’est probablement jouée à « pas grand-chose ». À l’exposition plus sud ouest que sud tout court, peut-être, qui donne cependant à la cuvée La part des anges tout le loisir de profiter du soleil de l’après-midi. Le coteau est très pentu. Le sol riche en marnes calcaires et en argiles blanches. Bref, « un très beau terroir » qui n’a pas à rougir des vignes voisines.Cuvée « emblématique ». Corinne et Jean-Pierre Grossot font perdurer cette cuvée lancée en 1996, devenue « emblématique » au domaine. La vinification se fait à part, mais « comme nos autres vins. 100 % en cuve. Avec des levures indigènes. On limite les intrants au maximum », présente la vigneronne. À ceux qui goûteront au millésime 2020, l’année est plutôt « classique chablis ». « Une belle énergie et minéralisé ». Qu’on peut déguster dès maintenant, ou garder encore un peu précieusement. Deux, trois ans.Vieux comté et poisson blanc. Passons à table et rêvons un peu de bord de mer. On invite crustacées et poissons blancs dans les assiettes. Pourquoi pas de l’églefin cuit au four, quelques légumes vapeur. Un repas léger quoique, attendez… Ajoutez donc un morceau de vieux comté pour terminer, et combler ce petit creux que la gourmandise ne cesse d’agrandir.Domaine Corinne & Jean Pierre Grossot, chablis La Part des Anges, millésime 2020.Caroline Girard
« Oh ! » le beau beaujoDialogue de sourds autour d’un verre : - T’as bu quoi hier soir ?- Oh !- Pardon ?Mais oui, pourquoi ce drôle de nom ? « Oh ! » Juste ça. Rien d’autre. A cause de notre bouche dessinant un large rond ahuri parce qu’on trouve ça terriblement bon ? Parce que le vin n’a pas besoin de mille mots et qu’un simple Oh exclamatif et joyeux suffit, parfois ? Bref, ce petit Oh ! en forme d’entrée de gamme chez Yann Bertrand est une grande quille qui vient chambouler les buveurs d’étiquettes et faiseurs de phrases persuadés que « Oh le beaujolais c’est quand même bof ». Non, justement, ces temps-ci, il fait très beau sur le beaujo. Et les Bertrand n’y sont pas pour rien. En sol majeur. Ici, on ne trouve pas trace d’un oenologue. Au placard les prescripteurs de goût. Le vin est affaire d’artisan. Et d’évidences qui ne vieillissent pas. « C’est à la vigne que l’on fait le vin. » La phrase guide le travail des Bertrand depuis plus de quinze ans. Tout commence dans le sol. A cultiver, soigner, écouter. Yann Bertrand ne brusque rien, laisse faire la plante et ne jure que par les tailles douces. En cave, ni fûts neufs ni intrants. Juste la quête de vins vibrants et tendus.Du fruit, du fruit, du fruit. Dans le verre, ce « Oh ! » 2022 (16 euros) est un panier tout rouge farci de framboises et de cerises. Flacon croquant doté d’une belle pointe d’acidité qu’on aime seul ou accompagné d’un morceau de charcuterie. Oh que les soirées sont douces, parfois. Stéphane Vergeade
Le grolleau de TouraineFruité et complexe. Le cépage grolleau, ou groslot, n’avait pas, jusqu’à présent, été aperçu sur notre radar œnologique. Alors, découvrant l’animal, on a dérogé à la règle, en passant un coup de téléphone à Timothée Delalle, l’auteur de ce Grolleau de Cinq-Mars, une bouteille dénichée chez un bon caviste, pour 11 euros. Son vin est gourmand et fruité comme on s’y attendait mais le vigneron a su lui donner densité et complexité.Ancien roi de Touraine. Alors Timothée, pourquoi le grolleau ? « C’est un cépage qui était majoritaire en Touraine. Et c’était un gros producteur, d’où son nom. Quand je suis arrivé ici, en 2018, c’était un peu la découverte. J’en avais un peu vinifié avant, en rosé. » Le vigneron arrivait alors de Montlouis-sur-Loire, plus à l’est. Il s’installe sur de vieilles parcelles à Luynes, en IGP Val de Loire, pas très loin de Cinq-Mars-la-Pile, l’un des berceaux du grolleau. Un terroir rive droite, quelque peu délaissé aujourd’hui. « Je cherchais des vieilles vignes et un vieux terroir. Il y a des parcelles de grolleau âgées de 60 à 70 ans, j’ai décidé de le vinifier en rouge. Ça a bien plus, alors je m’y suis intéressé. »L’avenir appartient au grolleau. Peu alcoolisé et peu sensible aux maladies, le cépage qui faisait la joie des vignerons du dimanche semble aujourd’hui taillé pour affronter le réchauffement climatique. Et il intéresse de plus en plus les vignerons de bourgueil, note Timothée Delalle. Avec ses vieilles vignes, « qui donnent moins mais mieux », le vigneron veut maintenant en faire un vin « haute couture », avec Le Haut du Repos, une cuvée vinifiée pour la garde, qui complète son Grolleau de Cinq-Mars. Le grolleau a tout d’un grand !Philippe Cros
Ce que dira la SyrahHalte aux amitiés complexes, faisons simple. Le vin ne se paie pas de mots, parfois. Et tient dans un trait de caractère, un seul, qui déclenche un irrépressible goût de reviens-y. Exemple avec cette syrah signée Laurent Combier qui emporte une belle cargaison de fruits dans sa besace et, surtout, saisit par son côté poivré propre à faire bondir le sourcil tout surpris de retrouver avec autant de typicité les marqueurs du rhône septentrional.Histoire de famille. Il faut dire que Combier est un maître des lieux qui a su dompter les secrets du coin, la puissance de la syrah, la langue du sol argilo-calcaire et les galets roulés si doués pour capturer les rayons du soleil. Il travaille aujourd’hui 25 hectares du côté de Crozes-Hermitage, avec ses fils David et Julien qui doucement prennent la main et perpétuent les recettes maison, pour longtemps. La guerre des Crozes. L’histoire débute avec cette petite cuvée portant haut le piquant des crozes qui font merveille sur un onglet à peine grillé sur le dessus. Le flacon peut être bu sur ses premières années et accompagné d’une tablée joyeuse qui aux vins avec froufrous préfère les flacons francs du collier qui ne masquent pas ce qu’ils ont à offrir. D’abord, il y a les fruits rouges servis sur un tapis de roses. Mais très vite, le poivre corse l’affaire et lui confère un côté dangereusement addictif. D’autant que le flacon n’affole pas le portefeuille : à 11 euros, il faut vite la porte du domaine. Et, si possible, goûter la grande cuvée, le Clos des Grives, l’un des plus grands vins du secteur avec la Guiraude du regretté Alain Graillot. Voici les géants de la guerre des Crozes.Stéphane Vergeade